Maladie auto-immune, le lupus a longtemps été une maladie grave et incurable. Les progrès constants de la médecine l'ont amené à devenir une maladie chronique que l'on parvient à maîtriser en partie et qui n'influe plus sur l'espérance de vie des patients.
Pour autant, le lupus reste une maladie complexe et parfois handicapante, dont les causes ne sont toujours pas connues, et dont les traitements présentent d'importants effets secondaires à mettre en perspective avec les symptômes de la maladie. Faisons le point sur les connaissances concernant le lupus et plus spécifiquement le lupus érythémateux disséminé (LED).
Lupus : maladie complexe
Définition de la maladie
Le lupus est une maladie auto-immune chronique. C'est-à-dire que le système immunitaire, celui qui protège l'organisme des infections et bactéries, se retourne contre l'organisme lui-même.
Ainsi, le lupus est caractérisé par des auto-anticorps qui sont dirigés contre différentes parties du corps et jouent un rôle important dans l'atteinte des différents organes.
Les lymphocytes, acteurs prépondérants de l'immunité, sont produits en excès et sont responsables de réactions inflammatoires et de lésions de différents tissus et organes.
À noter : le lupus touche environ 30 000 patients en France. Il touche préférentiellement les femmes de 15 à 45 ans (90 % des cas).
Différentes formes de lupus
Voici les différentes formes de lupus :
- La forme la plus fréquente de lupus est le lupus érythémateux disséminé (LED), qui peut toucher de nombreuses parties du corps, en particulier les articulations, la peau, les reins, le cœur et le cerveau.
- On parle aussi de "lupus discoïde", qui est une maladie de peau chronique. Les lésions forment notamment des marques caractéristiques, en forme d'ailes de papillon, sur le visage. Le plus souvent, ce lupus n'évolue pas vers un lupus disséminé.
- Le lupus induit est déclenché par un médicament et disparaît à l'arrêt de celui-ci.
- Le lupus néonatal concerne plus spécifiquement les bébés, à qui la mère a transmis le lupus pendant la grossesse ou lors de l'accouchement.
- Il existe également des lupus pédiatriques. Cependant, ils sont rares : environ 5 % de la totalité des lupus.
Causes et symptômes du lupus
Causes inconnues du lupus
S'il est établi que le lupus touche plutôt des femmes en âge de procréer, ses causes restent inconnues encore aujourd'hui, elles sont sans doute multifactorielles. Il a cependant été établi plusieurs facteurs déclenchants :
- une prédisposition génétique ;
- l'exposition au soleil ;
- le stress ;
- la grossesse ;
- les hormones féminines, comme le laisse supposer la répartition de la maladie : 9 femmes pour 1 homme ;
- l'appartenance à certains groupes ethniques : afro-américains, autochtones d'Amérique du Nord, asiatiques ;
- des facteurs environnementaux : certains virus (virus d'Epstein-Barr…), des médicaments, des toxiques.
Plusieurs symptômes relatifs au lupus
Une caractéristique du lupus reste son évolution sous forme de poussées entre lesquelles on observe des phases de rémission, d'autant plus longues lorsque le traitement est bien maîtrisé à une juste et faible dose.
À noter : le lupus, qui n'est pas contagieux, se manifeste très différemment d'une personne à l'autre. Les signes cliniques ne sont pas tous toujours présents, apparaissent à des moments différents de la maladie, et s'associent peu à peu au fil des poussées.
En termes de symptômes, on peut faire la liste suivante (non exhaustive) :
- de la fièvre, de la fatigue ;
- des douleurs articulaires ou musculaires ;
- une atteinte de la peau ;
- une grande sensibilité au soleil ;
- une atteinte de différents organes qui sont plus ou moins endommagés et lésés : reins, poumons, système digestif, yeux (syndrome de Gougerot-Soljgren ou syndrome sec), artères, cerveau, etc. ;
- une atteinte du sang, avec des perturbations pouvant toucher les globules blancs, globules rouges, les plaquettes ;
- des petites plaies dans la bouche ou les narines, une perte de cheveux ;
- une plus grande susceptibilité aux infections en raison de l'atteinte du système immunitaire ;
- le syndrome de Raynaud : les doigts ou les orteils bleuissent facilement en cas de froid ou de stress.
Bon à savoir : il existe aussi une anomalie particulière au lupus : le syndrome des anti-phospholipides, qui se caractérise par la formation de caillots. Par ailleurs, chez les femmes, les manifestations de la maladie s'atténuent généralement au moment de la ménopause.
Diagnostic du lupus
Établir le diagnostic d'un lupus est particulièrement complexe, du fait qu'il n'y a pas de symptômes spécifiques du lupus. La première poussée survient généralement après un événement déclenchant particulier.
Diagnostiquer un lupus se passe en 3 phases :
- confirmer le diagnostic ;
- localiser les atteintes des organes ;
- rechercher une autre maladie auto-immune.
Aujourd'hui, il existe un classement de 11 critères pour aider au diagnostic (American College of Rheumatology, 1997) : la présence de 4 critères sur 11 peut orienter la suite des examens à pratiquer en faisant soupçonner un lupus. Cependant, il est rare que 4 critères soient présents d'emblée dans le tableau clinique.
Le diagnostic se fondera donc sur un ensemble de plusieurs éléments : sur l'examen clinique complet, les examens sanguins mettant en évidence la présence d'anticorps, des radiographies, des IRM, des bilans des fonctions hépatique et rénale, etc.
À noter : la liste des examens à pratiquer n'est pas exhaustive du fait des multiples atteintes possibles.
Association avec d'autres maladies auto-immunes
D'autres maladies auto-immunes peuvent s'associer au lupus :
- le syndrome de Gougerot-Sjogren, qui se manifeste par une sécheresse des yeux et de la bouche ;
- le syndrome des anticorps anti-phospholipides (SAPL), qui se caractérise par l'apparition de caillots sanguins ;
- d'autres maladies auto-immunes systémiques : myopathies inflammatoires, la polyarthrite rhumatoïde, la sclérodermie, etc.
Par ailleurs, les femmes présentant un lupus érythémateux systémique ont deux fois plus de risque de développer un cancer du col de l’utérus. Il existe également un risque accru de dysplasies cervicales (lésions précancéreuses) et de cancer invasif chez les femmes dont le lupus est traité par immunosuppresseurs plutôt que chez celles traitées par anti-inflammatoires.
Pour ce qui est du lupus érythémateux disséminé, on constate qu'il s'associe à une hypertension artérielle réfractaire (résistante aux traitements) dans 10 % des cas, soit deux fois plus que dans le reste de la population (notamment chez les sujets noirs, avec altération de la fonction rénale, hypercholestérolémie et/ou élévation des biomarqueurs de l’inflammation). Cette forme d’HTA multiplierait par près de trois la mortalité globale des patients victimes de lupus.
Source : Gandelman JS et coll. : Increased Incidence of Resistant Hypertension in Patients with Systemic Lupus Erythematosus: A Retrospective Cohort Study. Arthritis Care Res (Hoboken). 2019 : publication avancée en ligne le 15 mars. doi: 10.1002/acr.23880.
Lupus : diagnostics différentiels
Au vu de la multitude de ses symptômes et de son côté "polymorphe", le lupus peut être confondu avec nombre d'autres pathologies :
- des maladies d'atteinte articulaire inflammatoire (polyarthrite rhumatoïde, spondylarthrite ankylosante, arthrites réactionnelles...) ;
- des maladies avec fièvre au long cours (cancers, infections bactériennes ou virales…).
Lupus : quel traitement ?
Le lupus se caractérise par l'alternance de poussées et de périodes de rémission, celles-ci pouvant durer pendant plusieurs années.
Bien traité, un lupus n'empêche pas une vie active normale si l'on prend quelques précautions :
- éviter l'exposition solaire ;
- respecter toutes les consignes inhérentes au traitement, y compris les régimes alimentaires particuliers ;
- avoir une activité physique modérée(plusieurs études montrent que les programmes d’activité physique en aérobie diminuent le risque cardiovasculaire et améliorent la capacité respiratoire, la fatigue, la dépression et la qualité de vie) ;
- arrêter complètement le tabac ;
- prendre l'avis de son médecin avant toute vaccination, opération, projet de grossesse ;
- être particulièrement vigilant lors des voyages, surtout dans les pays où le paludisme est endémique.
À noter : le traitement du lupus sera le plus souvent personnalisé en fonction des différents symptômes et atteintes.
Les médicaments qui peuvent être utilisés sont :
- les corticostéroïdes (notamment le prednisone) ;
- les immunosuppresseurs ;
- l'aspirine ou les anti-inflammatoires non stéroïdiens ;
- les antipaludéens ;
- les anticorps monoclonaux.
Conseil : n'oubliez pas de discuter sérieusement avec votre médecin des bienfaits et des risques d'effets secondaires des traitements (à des doses supérieures à 30 mg/jour, le prednisone entraîne entre autres des néphrites et des thrombocytopénies). Il est conseillé de consulter un rhumatologue pour la prise en charge de votre lupus.
Il faut savoir qu'en cas de lupus, le premier mois du traitement par corticothérapie est prédictif de ce qui sera administré les 11 mois suivants. Ainsi, il faut tout faire pour limiter la quantité de corticoïdes oraux prise au début de la maladie pour faire en sorte qu'il soit possible de réduire les besoins par la suite.
Il est par ailleurs indispensable d'assurer un suivi régulier, avec des examens biologiques permettant de suivre l'évolution de la maladie, ainsi que l'éventuelle atteinte de nouveaux organes. Un suivi gynécologique est également indispensable pour détecter précocement un éventuel cancer du col de l'utérus.
Aujourd'hui, quoiqu'on ignore encore les causes précises et que l'on ne peut prédire l'évolution individuelle d'un lupus, la mise au point d'un traitement curatif semble se rapprocher.
Bon à savoir : la biothérapie (et notamment celle à base d'anti-TNF alpha), qui cible un acteur biologique de l'immunité, pourrait donner naissance à de nouveaux médicaments dans les années à venir (paradoxalement les anti-TNF alpha peuvent eux-mêmes induire l'apparition d'un lupus érythémateux disséminé ou d’autres maladies auto-immunes (vascularite, polyarthrite rhumatoïde, hépatite ou thyroïdite, par exemple).
Pour le moment, on peut parler :
- du belimubab, qui est dirigé contre le facteur de croissance des lymphocytes ;
- le lupuzor, thérapie par les peptides, actuellement en phase 3 des essais cliniques, et qui présente de nombreux avantages.
La recherche est donc très active pour envisager des traitements adaptés à chaque patient et permet d'espérer des traitements et une meilleure qualité de vie pour les personnes souffrant de lupus. Néanmoins, en raison de leur coût très élevé ces molécules (rituximab, infliximab, adalumimab, étanercept, abatacept) ne sont utilisées que lorsque les autres traitements échouent.
À noter : l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) appelle à différer à un an la vaccination par des vaccins vivants atténués des nouveau-nés (BCG, le ROR, les vaccins contre la fièvre jaune, les rotavirus ou la varicelle), dès lors que leur mère a été traitée par infliximab d'autant que « par leur mode d’action, les médicaments à base d’infliximab affaiblissent le système immunitaire des patients traités », rapporte l'ANSM.
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